Un podcast de critique littéraire de 10 minutes de France Culture > ici. La page propose par ailleurs un lien sur un autre podcast de 16 minutes traitant de et auteur.
(VIS COMICA a déjà parlé d’un ouvrage précédent de cet auteur > ici)
Texte de France Culture :
Les critiques discutent de « Correction automatique », un recueil de trente-trois récits courts et percutants d’Etgar Keret, qui mêlent humour, dystopie et fantastique pour raconter notre monde absurde.
Avec
Marie Sorbier, productrice du « Point Culture » sur France Culture, et rédactrice en chef de I/O
Céline du Chéné, productrice à France Culture
Dans un monde des plus sombres, Etgar Keret trouve le moyen de rire, seule solution pour rendre la réalité supportable. Dans les trente-trois récits courts qui composent Correction automatique, on croise entre autres un célibataire fauché et asthmatique en perte de foi, le candidat d’un jeu de téléréalité venu d’une autre dimension, le propriétaire d’un astéroïde qui s’apprête à percuter la Terre, et même une intelligence artificielle au bord du suicide.
L’écrivain israélien, l’un des plus reconnus – et déjanté – de sa génération, qui est aussi cinéaste et auteur de bandes dessinées, pointe du doigt avec ces nouvelles notre monde qui déraille, à l’aide d’un mélange de science-fiction, de dystopie et de fantastique où la comédie n’est jamais loin.
Les avis des critiques
- Marie Sorbier : « Je suis une lectrice assidue d’Etgar Keret et je suis très admirative de son talent de nouvelliste. Il réussit à écrire des histoires extrêmement courtes, de parfois deux ou trois pages seulement. C’est très condensé et surtout très drôle. C’est un rire triste, très amer, chargé du poids du monde : ce livre se lit en prenant en compte le contexte israélien. On sent que Keret croit profondément au pouvoir de la littérature et que ses histoires sont une façon de panser les plaies de ses contemporains. Chaque nouvelle est une dystopie, comme si Black Mirror avait été réécrit de manière humoristique. Il y a un nombre d’idées incroyable, j’ai eu l’impression de lire des résumés de film : chaque nouvelle ouvre un abîme de réflexions et pourrait être développée en un livre ou un film entier. Il y a par exemple ce jeu télévisé où les participants sont envoyés dans un monde parallèle et doivent deviner quel élément manque. Une femme découvre alors qu’elle se trouve dans un monde sans perche à selfies. Il y a aussi ces extraterrestres qui reviennent sur Terre pour qu’on leur raconte l’histoire de Roméo et Juliette. Toutes ces histoires ne sont pas juste des blagues : en exagérant, elles décrivent avec encore plus d’acuité l’absurdité contemporaine dans laquelle on vit. »
- Céline du Chéné : « Ce livre est une belle découverte. Il est difficile à lire sans penser à la situation israélienne actuelle mais de manière intéressante, seules deux nouvelles ont été écrites après le 7 octobre 2023. L’auteur explique que la plupart des récits ont été écrits pendant le confinement et après la mort de sa mère, mais qu’il les trouvait trop sombres pour être publiés. Quelques mois plus tard, il s’est rendu compte que ces histoires collaient au contraire avec la réalité devenue elle-même plus sombre. J’ai été complètement happée par ce côté crépusculaire des nouvelles, cette ambiance de fin du monde où les gens meurent tout le temps, cette absence d’avenir. Mais c’est raconté avec tellement d’humour qu’on rit avec l’auteur de ces situations incongrues. Malgré ce décor apocalyptique, il y a une grande tendresse, qui traduit à mon avis la vision qu’il a de sa propre société. Ces microfictions très concises créent un sentiment d’urgence qui va très bien avec les thématiques développées. On rit, on pleure et on devient philosophe de l’absurde. »
Le livre, traduit de l’hébreu par Rosie-Pinhas Delpuech, a paru chez L’Olivier.
Extrait sonore
- Lecture d’un extrait de Correction automatique d’Etgar Keret par Nicolas Berger.